LES ENTREPRISES DE L'ETAT sont des actrices importantes de l’économie mondiale. Elles opèrent de plus en plus souvent au niveau transnational et sont actives dans un large éventail de secteurs dont certains comportent des risques importants d’impacts négatifs en matière de droits humains.
D’après les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme (PDNU) adoptés en 2011, les États ont le devoir de protéger contre les violations des droits humains impliquant les entreprises commerciales. Et cela en particulier dans le cas « des entreprises qui leur appartiennent ou sont contrôlées par eux [...] y compris, le cas échéant, en prescrivant l’exercice d’une diligence raisonnable en matière de droits de l’homme » (principe 4 des PDNU). Ce principe constitue ainsi un appel aux États et aux entreprises publiques de donner l’exemple concernant le respect des droits humains dans le cadre des activités économiques.
En 2020, lors du lancement de son Plan d’action national sur les entreprises et droits humains 2020-2022 (PAN), le gouvernement luxembourgeois s’est engagé à promouvoir la mise en place de projets pilotes sur la diligence raisonnable dans les entreprises à participation majoritaire d’État. Le PAN 2020-2022 arrivant à son terme, l’étude vise à faire un état des lieux des engagements en matière de droits humains pris par des entreprises de l’État.
INTRODUCTION
L’ASTM a analysé les politiques de 27 entreprises de l’Etat qui opèrent dans des secteurs économiques à risque en matière de droits humains.
Loin d’être des modèles pour le secteur privé, les entreprises de l’État font preuve d’un manque d’engagement et de compréhension des responsabilités qui leur incombent en tant qu’acteurs économiques. Ceci est en contradiction avec les ambitions du gouvernement qui se veut à l’avant-garde des droits humains.
RESUME EXECUTIF
27 entreprises de l'Etat ont été analysées,
dont 17 sociétés privées et 10 établissements publics
Ces entreprises répondent à 2 critères:
Elles opèrent dans un secteur économique à risque en matière des droits humains
L'Etat luxembourgeois détient la majorité ou la plus grande participation par rapport aux autres actionnaires.
SELECTION D'ENTREPRISES
RESULTATS PRINCIPAUX
En général, l'engagement des entreprises de l'Etat est
très insuffisant.
Les entreprises ont très peu de conscience de leur responsabilité en tant qu'acteurs économiques et de la nécessité d'identifier et d'évaluer systématiquement les risques de violations de droits humains dans la chaîne de valeur.
Les mauvais résultats sont regrettables si l'on considère qu'il s'agit d'entreprises dans lesquelles
l'Etat luxembourgeois, membre du Conseil des droits de l'homme des Nations unies, dispose d'un pouvoir d'influence.
Sur les 27 entreprises analysées, 18 ont obtenu 0 points, car elles n'ont publié aucun document faisant référence à la prise en compte des droits humains dans leurs activités.
Aucune des entreprises examinées n'obtient ne serait-ce que la moitié des points à attribuer. Il n'existe donc pas actuellement des « leaders » parmi les entreprises analysées.
Aucune entreprise ne démontre un alignement complet sur la responsabilité de respecter les droits humains telle que définie par les Principes directeurs des Nations Unies (PDNU).
REVENDICATIONS ET RECOMMANDATIONS
Le benchmarking montre que la mise en œuvre volontaire des Principes directeurs des Nations Unies (PDNU) ainsi que la divulgation d’informations sur les droits humains parmi les entreprises de l’État sont globalement faibles.
L’étude donne un aperçu de la manière dont les entreprises communiquent actuellement sur leurs efforts dans ce domaine. Il est possible que certaines entreprises fassent plus que ce qu’elles communiquent à l’extérieur, tandis que d’autres donnent une image irréaliste ou trop positive de leurs efforts. Malgré ces limitations, l’analyse fournit des informations utiles concernant le degré de mise en application des PDNU par les entreprises de l’État. Les entreprises de l’État devraient expliciter et communiquer davantage leurs engagements en matière des droits humains. Elles devraient mettre en place des systèmes globaux d’identification et d’évaluation des risques et des impacts qui sont exécutés de manière régulière. Enfin, les entreprises devraient également mettre à disposition des mécanismes de recours pour les victimes de violations des droits humains et collaborer dans la mise en place des mesures de remédiation.
Il est également à noter que l’analyse n’a pas porté sur d’éventuelles allégations de violations des droits humains en lien avec les activités des entreprises analysées. Il est donc tout à fait possible qu’il y ait des disparités entre les déclarations publiques et le comportement réel des entreprises.
Revendications aux acteurs politiques:
A la lumière des conclusions de l’étude, l’ASTM soutient les revendications de l’Initiative pour un devoir de vigilance et appelle l’État luxembourgeois, dans le cadre de son devoir de protection des droits humains et en accord avec les exigences des PDNU:
à veiller à ce que les entreprises à participation étatique garantissent pleinement et immédiatement une conformité avec les Principes directeurs des Nations Unies et de l’OCDE relatifs aux entreprises et aux droits humains au niveau de leurs propres activités économiques et celles de leur chaîne de valeur;
à respecter la volonté de 92% de la population résidente qui est favorable à l’adoption d’une loi nationale en conformité avec les normes internationales (Principes directeurs des Nations Unies et de l’OCDE) visant les entreprises dans tous les secteurs économiques du pays pour prévenir et traiter les atteintes aux droits humains et à l’environnement à chaque étape des chaînes de valeur et pour donner aux victimes la possibilité d’avoir accès à la justice en cas de préjudice.
Recommandations aux entreprises analysées par l'étude:
Pour les 27 entreprises analysées ici, la première étape à franchir est de changer la perception du concept de risque et de reconnaître qu’il existe, pour chaque acteur économique, des risques pour les personnes et pour la société, et pas seulement des risques financiers pour les entreprises et leurs investisseurs. Dans ce sens, nous appelons les entreprises:
à se donner les moyens pour se familiariser avec leurs responsabilités en relation avec la diligence raisonnable en matière des droits humains;
à communiquer davantage et de façon plus détaillée sur les mesures prises dans ce domaine, en donnant plus d’exemples des impacts spécifiques et des efforts réalisés concernant la communication avec les parties prenantes;
à donner des informations sur les mécanismes de recours en cas de violations des droits humains, à la fois pour les employés et les parties prenantes externes, ainsi que sur les remédiations fournies.
RESSOURCES
L'étude
Découvrez l'étude « Entreprises de l'Etat au Luxembourg: des modèles en matière de droits humains? ».
Résumé exécutif
Découvrez le résumé exécutif de l'étude « Entreprises de l'Etat au Luxembourg: des modèles en matière de droits humains? ».
Webinaire
Regardez l'enregistrement de notre webinaire du 2 mars 2023 sur les résultats de l'étude.